Bordeaux Matmut Atlantique : une pelouse malade du sport business ?

Alors que SBA, gestionnaire du stade Matmut Atlantique de Bordeaux, tente de sauver la pelouse attaquée par le champignon pythium, Arnaud Dugast, expert du gazon sportif, voit dans ce problème l’illustration d’une dérive du business lié au sport. Du coup, sa société, CoverGarden, ne parie plus seulement sur le sportif, elle joue la carte du particulier pour asseoir sa croissance économique. Attaquée depuis le mois d’août par le champignon pythium, la pelouse du stade pourtant flambant neuf du Matmut Atlantique de Bordeaux fait passablement pitié. Elle énerve aussi. Les sportifs, d’abord, qui la pratiquent et qui, bien au-delà de l’aspect esthétique, constatent – ce qui contredit au passage les arguments des jardiniers du lieu qui affirment le contraire – que les parties jaunies modifient la course du ballon et provoquent même une gêne dans leurs courses. La Ligue de football professionnel, ensuite. Par la  voix de son président, Didier Quillot, elle vient de faire savoir que parce qu’elle nuit à la qualité du spectacle, la pelouse malade pourrait coûter une amende aux Girondins de Bordeaux. Un club lui-même passablement énervé sur le sujet, qui annonce, par la voix de son président, Jean-Louis Triaud, qu’en cas d’amende, c’est le gestionnaire Stade Bordeaux Atlantique (SBA, filiale associant Vinci à Fayat), qui lui prend déjà 5 M€ par saison pour la location du stade, qui paiera celle-ci. Profitant actuellement d’un mois à venir sans match des Girondins à domicile, SBA se donne encore une dizaine de jours pour prendre une décision quant à la suite qu’elle donnera à l’opération de sauvetage en cours. Arnaud Dugast, PDG de la société girondine (Cestas) Sitoflor – CoverGarden, reconnue dans toute l’Europe pour sa capacité à pouvoir fournir des pelouses en rouleaux pour les plus grands stades de football, doute de la réussite de l’opération en cours. Expert de ce secteur d’activité, il avait été consulté par le constructeur et gestionnaire du stade, au moment de sa construction, avant de voir SBA choisir une pelouse innovante, AirFibr, mise au point par une jeune société, Natural Grass, créée en 2009. Cette pelouse repose sur un process hybride : une pelouse enracinée sur un sol de synthèse associant granules de liège, microfibres synthétiques et sable fin extra silicieux.
Matmut pêche par l’absence de plan B Pour Arnaud Dugast le principe même de AirFibr « n’est sans doute pas à remettre en question malgré cette crise cryptogamique. Au regard des demandes du stade, le substrat hybride AirFibr reste la meilleure solution technique.« . Le dirigeant de CoverGarden rappelle en outre que le pythium peut toucher toutes les pelouses, quelles qu’elles soient.
« Ce qui pose problème dans ce cas précis, c’est que je pense qu’au niveau de l’entretien cette pelouse hybride est plus compliquée à gérer que ce qui était prévu. Les sociétés qui ont été en charge de l’entretien de la pelouse ont fait tout leur possible chimiquement et physiquement pour éradiquer le champignon. Le terrain qui repose sur un substrat inerte est forcément plus difficile à entretenir et je crois qu’on lui prête des vertus qu’il n’a pas. Je pense que Natural Grass est vraiment au top de la technologie… mais qu’elle peut rencontrer des limites dans certaines conditions climatiques, et pour certains stades notamment les plus fermés. »
Estimant que les « bons vieux gazons, et les technologies d’avant ne sont peut-être pas mortes, contrairement à ce que pensaient certains gestionnaires de stade et des consultants ultra enthousiastes… », Arnaud Dugast rappelle surtout que plus que la technologie choisie, c’est l’absence de plan B qui risque de pêcher dans le cas du Matmut Atlantique.
« J’ai le sentiment qu’on est parti du postulat que rien ne pouvait arriver avec ce produit. Visiblement ce n’est pas le cas, et on sait maintenant que le remplacement de la pelouse devrait coûter entre 450 et 500.000 euros. En clair nous sommes trois fois moins chers pour la même opération ! Entendons nous bien, je ne reprocherai jamais à SBA de ne pas nous avoir choisis pour équiper le stade en gazon. Ce que je regrette en revanche c’est qu’aucune sécurité n’ait été prise en cas de problème. »
Arnaud Dugast se souvient sans doute qu’au départ de l’aventure AirFibr, SBA avait évoqué la possibilité de réserver une pelouse de secours auprès de sa société… mais finalement l’idée aurait été abandonnée.
« Aujourd’hui, si nous sommes amenés à livrer une pelouse au Matmut, il faut savoir que sur ce substrat, ce ne sera qu’une pelouse temporaire, un dépannage qui permettra au club de jouer. Si nous mettrons alors tous les moyens possible pour répondre aux exigences techniques de notre client, àce jour, nous ne sommes pas en mesure de fournir une pelouse sur substrat AirFibr parce que nous n’avons jamais été missionné pour ce travail. Et dire qu’avec la technique classique, celle du stade Chaban Delmas, aujourd’hui pratiquée par les rugbymen de l’UBB, la pelouse du Matmut aurait pu être replaquée deux fois dans la même saison pour le même coût. »

Fini le pari sportif, CoverGarden parie désormais sur les particuliers

Pour Arnaud Dugast, derrière le problème de pythium rencontré par les stades de Bordeaux, Toulouse et Bastia, se cachent les difficultés des entreprises à faire du business avec le monde sportif.
« Le business du sport est irrationnel. Les décideurs s’emballent parfois pour des techniques innovantes parce qu’elles fonctionnent sous certaines latitudes, sous certains climats ou dans certains stades. Nous on sème 12 mois à l’avance des pelouses alors que ce marché est extrêmement volatil et irrationnel. Certes, nos techniques ne proposent pas des solutions idéales, mais désormais il est difficile pour un acteur comme nous d’investir en R&D sans savoir ce qu’au bout du compte on va vendre car nos clients potentiels… Dans le monde du foot, on oublie par exemple que le Barcelone a été champion d’Espagne et d’Europe à de nombreuses reprises sur une pelouse tout ce qu’il y a de plus traditionnelle… »
Un gazon plusieurs fois sacré qui est sorti tout droit des pépinières situées au Barp de la société girondine qui cherche de plus en plus à se détacher du marché de la fourniture de gazons sportifs.
« Nous sommes toujours présents sur ce marché qui a fait notre histoire, et sommes toujours aptes à trouver les meilleures solution techniques pour les stades, ici en France et dans toute l’Europe. Mais désormais ce marché n’est plus le principal relais de croissance pour nous. »
Pour CoverGarden, désormais, c’est le marché du particulier  qui représente l’avenir.
« Ce marché est ultra porteur. La pelouse pour particulier, et mieux encore, l’entretien de la pelouse pour particulier, représente un secteur en forte croissance. Nous venons de créer une marque pour un nouveau service : CoverGarden Guard. Ce choix porte notre croissance et génère actuellement des embauches », assure le PDG de CoverGarden.
28/09/16 – latribune.fr – Lire l’article

À quoi ça sert d’avoir une bonne pelouse en rugby ?

Si la polémique est beaucoup moins virulente qu’en Ligue 1, la qualité des pelouses du Top 14 laisse parfois à désirer. Mais une bonne pelouse est-elle vraiment utile en rugby ? Oui, si l’on en juge par celle de Clermont, passé à l’hybride cet été.

La saison dernière, la Ligue nationale de rugby a dressé un classement des meilleures pelouses de France. La palme est revenue… à Bayonne, une formation de Pro D2, promue cet été. Pas la seule surprise de ce classement, où l’on retrouvait des cadors comme Montpellier (18e), Toulon (20e) ou encore Clermont (22e) bien plus bas que leur standing de demi-finalistes ne pourraient le laissaient penser. Dans un sport où le ballon n’est pas souvent au sol et où il rebondit à sa guise, sans avoir besoin de motte ou de trou pour dévier sa trajectoire, la qualité du terrain ne fait pas tout si l’on se fie au «vrai» classement du dernier Championnat. Mais l’enjeu d’une bonne pelouse, surtout si l’on défend une philosophie joueuse et tout terrain, est important. Peut-être pas autant qu’en foot (cf les derniers débats sur la question en Ligue 1) mais tout de même…
Clermont l’a bien compris. L’ASM devrait signer la plus belle remontée de la saison dans le classement alternatif de la LNR, grâce à sa nouvelle pelouse hybride posée à l’intersaison et inaugurée face au Racing, le 10 septembre dernier. Une semaine plus tard, après la réception de l’UBB dans la foulée, le bilan était excellent, avec en plus deux très larges victoires (47-10 et 40-16).
C’est le jour et la nuit», confirme Didier Bès, responsable de la mêlée auvergnate, et qui, du point de vue de sa spécialité, voit d’un très bon œil le nouveau billard du stade Michelin. Plus de pelouse qui se dérobe – comme on peut le voir même au Stade de France sur des matches internationaux -, une meilleure accroche pour son paquet d’avants et moins de mêlées écroulées. «Dans tous les débats actuels sur l’arbitrage en mêlée et la santé des joueurs, c’est loin d’être anodin, souligne l’ancien talonneur. On ne veut pas refaire 50 fois les mêlées pour protéger les joueurs et pour plus de spectacle, mais il y a des endroits où il n’y a pas d’accroche au sol.»
Et se rappelle, à son époque montpelliéraine, de ces «chers architectes» qui ont dessiné le Stade Yves-du-Manoir (désormais Altrad Stadium), inauguré en 2007 : «Ils se sont fait plaisir avec le bâtiment mais ont fait les fonds de tiroir pour faire la scène, à savoir le terrain, alors que la réflexion aurait dû être inverse à mon avis. Les diffuseurs, qui veulent plus de spectacle, devraient à mon avis mettre plus la pression sur les municipalités et les agglomérations pour de meilleures pelouses. Aux clubs aussi de faire les efforts.» Clermont l’a fait, avec une facture d’environ 1,5 million d’euros.
Derrière ces mêlées plus stables, il y a aussi des trois-quarts qui peuvent s’exprimer plus facilement, comme le confirmait le Clermontois Wesley Fofana dans nos colonnes le 17 septembre dernier : «Dès lors que tu poses un appui pour changer de direction, c’est plus stable, plus dangereux, plus utile.» «C’est toujours plus facile de développer un jeu de qualité, rapide, quand est sur un bon terrain, confirme Henry Chavancy, plutôt bien loti à Colombes avec ses coéquipiers du Racing 92. Quand, nous les trois-quarts, on a de bons appuis sur les crochets, qu’on peut prendre de la vitesse et transmettre la balle sans être empêtré sur un terrain compliqué, ça colle plus à notre philosophie de jeu.»
ui se souvient des terrains annexes piégeux quand il jouait avec les Espoirs du club ou encore du «traquenard» d’Oyonnax, avant l’arrivée du synthétique à l’été 2015. «Quand tu allais jouer là-bas, tu savais que les avants allaient peut-être s’amuser, dans la boue et le combat. Mais nous derrière… Après, c’était aussi lié aux conditions climatiques, entre la pluie, le gel… Un vrai champ de patates.» «Mais ça faisait aussi leur charme et leur force, selon Didier Bès. Ça faisait partie du jeu, jouer dans vingt centimètres de boue. Eux étaient habitués, ils s’y entraînaient toute la semaine. Avec le synthétique, ils sont descendus, je pense que c’est une explication parmi d’autres.» Finalement, une mauvaise pelouse peut aussi servir les intérêts de certaines équipes, ravies d’accueillir sur un terrain pas tout à fait lisse. Autant dire que 14 gazons impeccables en Championnat, ce n’est pas pour tout de suite.
28/09/16 – lequipe.fr – Lire l’article

Didier Quillot «regrette» les mauvaises pelouses de Ligue 1

Didier Quillot est revenu ce lundi sur le mauvais état de certains terrains de Ligue 1. Le directeur général exécutif de la Ligue a évoqué la possibilité d’instaurer des sanctions financières «en cas de pelouses insuffisantes» pour la saison prochaine.

Didier Quillot, le directeur général exécutif de la Ligue, est revenu, ce lundi après-midi, au cours d’une conférence de presse téléphonique, sur l’état lamentable de plusieurs pelouses de L1 : «Nous reconnaissons et regrettons cette situation. Nous avons écrit aux trois clubs concernés, Bastia, Bordeaux et Montpellier. Ils doivent nous proposer des solutions rapides. Par ailleurs, la commission « surfaces de jeu » se réunit mercredi prochain. Elle doit travailler sur les traitements nécessaires. Le 6 octobre, une autre réunion avec tous les référents pelouses des clubs a lieu à Lyon. Et enfin, nous réfléchissons à la possibilité d’établir des sanctions financières en cas de pelouses insuffisantes. Cela ne pourra être mis en place cette saison, mais peut-être la saison prochaine.»

26/09/16 – lequipe.fr – Lire l’article